La ville de Spili, les villages de Lampini, de Karines et de Mourne, les gorges de Frati et le dème d’Agios Vassilios (Ágios Vasíleios) en Crète

L’Agios Vassilios est une contrée essentiellement montagneuse, une zone de transition entre le massif des montagnes Blanches (Λευκά Όρη), à l’ouest, et le massif du Psiloritis (Ψηλορείτης), à l’est ; d’ouest en est, on rencontre :

• le mont Kryonéritis (Κρυονερίτης) (1 310 m), situé à la frontière avec le dème des Sfakia, dont les eaux sont drainées par la rivière Polyrrizo (Πολύρριζο), près de Rodakino ;
• le mont Kouroupa (Κουρούπα) (1 001 m), séparé du mont Kryonéritis par les gorges de la rivière Kotsifos ; au pied du versant nord du mont Kouroupa s’étend la plaine de l’Agios Vassilios, drainée par la rivière Kourtaliotis.
• le mont Xiron (Ξηρό) (904 m), séparé du mont Kouroupa par les gorges de la rivière Kourtaliotis (Κουρταλιώτικο φαράγγι).
• le mont Sidérotas (Σιδέρωτας) ou Assidérotas (Ασιδέρωτας) (1 177 m), séparé du mont Xiron par les gorges de Frati.
• le mont Kédros (Κέδρος) ou Kentros (Κέντρος) (1 777 m), séparé du mont Sidérotas par la vallée de la rivière de Kissos (Κισσανός ποταμός) ; au nord du mont Kédros s’étend le plateau du Gious Kampos.
• le mont Vouvala (Βουβάλα) (945 m), séparé du mont Kédros par la vallée de la rivière d’Akoumia (Ακουμιανός ποταμός) ; au pied du versant sud du mont Vouvala s’étend la côte d’Agios Pavlos ; à l’est du mont Vouvala se trouve le cours inférieur du fleuve Platys qui se jette dans la mer de Lybie près d’Agia Galini.

Le dème d’Agios Vassilios correspondant à la province du Syvritos inférieur, ou Kato Syvritos (Κάτω Σύβριτος), de la seconde époque byzantine ; sous la domination vénitienne la châtellenie Saint-Basile (Castellania San Baseio) devait avoir son siège à Agios Vasillios ; comme cette châtellenie ne dépendait pas d’un château elle était plutôt nommée « judicat » (giudicato).

Le territoire du dème d’Agios Vassilios est identique à celui de l’éparchie d’Agios Vassilios (επαρχία Αγίου Βασιλείου) dans l’ancien découpage administratif. L’Agios Vassilios est bordé : à l’ouest, par le dème des Sfakia, situé dans la province de La Canée ; au nord, par le dème de Réthymnon ; à l’est, par le dème d’Amari ; au sud-est, le dème d’Agios Vassilios a une très courte frontière avec le dème de Phaistos, situé dans la province d’Héraklion.

La commune de Saint-Basile comprend vingt-six communautés locales réparties en deux cantons :

• à l’ouest le canton du Finikas (Δημοτική Ενότητα Φοινικα) dont le chef-lieu est le village de Sellia et la localité principale la station balnéaire de Plakias.
• à l’est le canton de Lampi (Δημοτική Ενότητα Λάμπης) dont le chef-lieu est la ville de Spili, qui est aussi le chef-lieu de la commune d’Agios Vassilios.

Le canton de Lampi comprend quinze communautés locales : Karinès (Καρίνες), Lampini (Λαμπινή), Spili (Σπήλι), Myxorrouma (Μυξόρρουμα), Mourné (Μουρνέ), à proximité des gorges de Frati, Kissos (Κισσός), Kentrochori (Κεντροχώρι), Krya Vrysi (Κρύα Βρύση), Orné (Ορνέ), Mélampès (Μέλαμπες), Agia Galini (Αγία Γαλήνη), Drimiskos (Δρίμισκος), Kéramès (Κεραμές), Ardaktos (Άρδακτος), Akoumia (Ακούμια), avec la célèbre plage de Triopétra, Saktouria (Σακτούρια), qui comprend aussi les localités de Kato Saktouria (Κάτω Σακτούρια) et d’Agios Pavlos (Άγιος Παύλος).

À l’est du mont Vorizi (930 m) se trouve le plateau du Gious Kampos. Depuis Spili, un tronçon du sentier européen de Grande Randonnée E4 permet d’atteindre le village de Gérakari, dans la vallée d’Amari, en traversant le plateau du Gious Kampos ; cet itinéraire part de l’est de Spili, près du Centre de Santé (Κέντρο Υγείας Σπηλίου), en direction de la petite église du Saint-Esprit (Άγιο Πνεύμα).

Aller au départ du sentier avec Google Maps (35.216780, 24.536756).

La localité de Spili se trouve à mi-chemin sur la route provinciale de Réthymnon à Agia Galini, à 27 km au sud de Réthymnon et à 25 km au nord-ouest d’Agia Galini ; sur cet axe circulent de nombreux autocars de la compagnie KTEL La Canée - Réthymnon. Spili se trouve à 19 km au nord-est de la célèbre plage de Prévéli et à 21 km au nord-est de la station balnéaire de Plakias.

Spili compte une population de moins de 600 habitants dont l’activité primaire est l’agriculture et l’élevage, mais, de plus en plus, l’activité tertiaire du tourisme. Spili est le chef-lieu du dème d’Agios Vassilios (Δήμος Αγίου Βασιλείου), le chef-lieu du canton de Lampi (Δημοτική ενότητα Λάμπης) et le chef-lieu de la communauté locale de Spili (Κοινότητα Σπηλίου) qui comprend aussi le petit village de Dariviana (Δαριβιανά), situé en amont de Spili sur la route provinciale.

Le toponyme « spíli » dérive du nom grec désignant une grotte, « spílaio » (σπήλαιο, pluriel σπήλαια) ou « spiliá » (σπηλιά, pluriel σπηλιές), en raison du grand nombre de grottes de la région. Il ne faut pas confondre Spili avec le village de Spilia, situé près de La Canée.

Le village de Spili est traversé par la route provinciale qui devient la rue principale de la localité, ce qui nuit quelque peu au charme de la localité et incite à continuer sa route sans s’arrêter. On peut cependant se garer sur le parc public de stationnement, situé en contrebas d’un virage serré près de la célèbre fontaine aux Lions, et découvrir plus en profondeur le village. En traversant la route provinciale on peut explorer les ruelles dallées du vieux village de Spili, qui escaladent les pentes du mont Vorizi, bordées de maisons datant de l’époque vénitienne :

• dans le centre on découvrira l’église Saints-Charalampe-et-Théodore (Άγιος Χαράλαμπος και Άγιος Θεόδωρος) ; cette église à deux nefs recèle une belle iconostase avec de belles icônes du XIXe siècle.
• dans le quartier de l’église Saint-Charalampe se trouve un petit musée des Arts et Traditions Populaires de Spili (Λαογραφικό Μουσείο Σπηλίου) ; ce musée, créé par une association de femmes de Spili, présente des objets du quotidien, des ustensiles ménagers et agricoles.

L’attraction touristique principale de Spili est cependant son étonnante fontaine ; Spili est en effet construit en forme de théâtre adossé au mont Vorizi, qui est un gigantesque château d’eau dont les eaux se déversent toute l’année, notamment dans la fontaine de Spili et dans les gorges d’Agia Fotia. La fontaine de Spili, que l’on peut voir de nos jours, a été construite dans les années 1960, en remplacement d’une fontaine vénitienne, datant vraisemblablement du XVIe siècle.

La fontaine principale de Spili, Kéfalovryssi (Κεφαλοβρύση), comprend un long bassin, de plus de 10 m de longueur, dans lequel l’eau se déverse par dix-neuf gargouilles à gueule de lion, et un second bassin, plus court, avec six autres gargouilles à gueule de lion, censé être le Lion de Venise. Le débit de ces vingt-cinq gargouilles représente environ 330 m³ par heure, soit plus de 90 l par seconde, d’une eau de source très pure, riche en fer et autres minéraux, et qui a une température constante de 13 °C.

Les bassins de la fontaine se déversent dans le ruisseau de Spili, qui forme une petite cascade artificielle ; au sud du village, ce ruisseau conflue avec la rivière de Kissos avant de s’engager dans les gorges de Frati. Près de cette cascade se trouve le buste d’un célèbre joueur de lyre byzantine, originaire de Spili, Thanassis Skordalos (Θανάσης Σκορδαλός) (1920 - 1998).

Du côté sud de la route provinciale, en contrebas du parc de stationnement, se trouve un moulin à eau qui était alimenté par le ruisseau de Spili et les eaux de la fontaine et dont on peut voir le bief qui amenait l’eau jusqu’à la roue hydraulique ; d’autres moulins à farine (αλευρόμυλος) semblables étaient alimentés par les sources du mont Vorizi, comme celui qui se trouve au débouché des gorges d’Agia Fotia à 1 km à l’est du village.

À l’entrée ouest du village se trouve l’église cathédrale orthodoxe de la Métropole de Lampi, de Syvritos et des Sfakia (Μητρόπολις Λάμπης, Συβρίτου και Σφακίων) ; la cathédrale Saints-Pierre-et-Paul (Άγιοι Πέτρος και Παύλος) a été construite en 1962. L’ensemble religieux de la métropole comprend également un monastère dédié aux saints Raphaël, Nicolas et Irène (Άγιοι Ραφαήλ, Νικόλαος και Ειρήνη).

La localité ne compte qu’un peu plus d’une centaine d’habitants mais constitue à elle seule une communauté locale (Κοινότητα Λαμπινής) du dème de Saint-Basile.

Le toponyme de Lampini serait lié à la cité antique de Lappa (Λάππα), également nommée Lampa (Λάμπα), Lampai (Λάμπαι) ou Lampi (Λάμπη) située près de l’actuel village d’Argyroupoli, à environ 17 km à l’ouest de Lampini ; Lampi est aussi le nom du canton où se trouvent Spili et Lampini, mais pas Lappa …

La principale attraction touristique de Lampini est son église Notre-Dame. La Panagia de Lampini (Παναγία Λαμπηνή) est une église dont la construction remonte au XIe ou au XIIe siècle, durant la seconde époque byzantine de la Crète. L’église présente un plan au sol en forme de croix grecque, surmontée par un dôme dont la coupole s’appuie sur quatre piliers ; sa façade est surmontée d’un clocher-mur spectaculaire ; la plupart des fenêtres, avec arc en plein cintre, ont été murées, y compris celles du tambour de la coupole. L’intérieur de l’église recèle des fresques datant du XIIe siècle au XVe siècle ; les fresques de la fin du XIIe siècle peuvent être vues sur le mur de l’abside et sur le bas des murs de la nef ; des fresques du milieu du XIIIe siècle se trouvent sur les murs des bras du transept ; les fresques les plus récentes, du XIVe siècle et du début du XVe siècle, couvrent la plus grande partie des murs, avec des représentations de la vie de la Vierge Marie et de la seconde parousie du Christ. La plupart des fresques sont plutôt fanées par le temps et par un incendie en 1829.

Pendant le soulèvement crétois de 1821 à 1829, l’église de la Panagia fut le théâtre d’un massacre : un habitant de Lampini avait tiré sur un janissaire ottoman du village, dénommé Albanis (Αλμπάνης), en le blessant mais sans le tuer. Le 20 janvier 1829, le janissaire revint avec une troupe et encercla l’église pendant la célébration de la messe ; les villageois se barricadèrent dans l’église mais les Turcs mirent le feu à la porte de l’église et pénétrèrent à l’intérieur ; ils massacrèrent les hommes et emmenèrent les femmes et les enfants à Réthymnon pour les vendre comme esclaves.

La localité compte près de 200 habitants mais constitue une communauté locale (Κοινότητα Καρινών).

À environ 1,5 km au nord-ouest du village on peut découvrir les gorges de Karinès, ou gorges « kariniotiques » (καρινιώτικο φαράγγι) ; ces gorges présentent la particularité géologique d’être creusées dans des roches constituées de flysch, et non de calcaire comme la plupart des gorges de Crète. Ce sont des gorges d’une longueur plutôt modeste, quelques centaines de mètres, mais spectaculaires ; les gorges abritent une population de chênes kermès et d’érables. Il est possible de les parcourir à pied en été, quand le cours d’eau est presqu’à sec, avec seulement quelques petites cascades à franchir.

Aller aux gorges de Karinès avec Google Maps (35.250919, 24.511096).

Une manière plus pittoresque d’atteindre l’entrée des gorges de la Kourtaliotis, depuis Spili, est de se diriger au sud-ouest vers Mourné, puis vers Frati par une petite route, en forte pente, jalonnée de vieilles églises ; à Frati une petite route rejoint la route provinciale de Koxaré à Assomatos à l’entrée des gorges de la Kourtaliotis.

Un autre itinéraire, moins usité, consiste à contourner le mont Xiron par l’est, en empruntant une petite route de montagne qui relie Mourné à Drimiskos ; à Drimiskos on continue vers l’ouest en empruntant la route provinciale de Drimiskos à Assomatos (Επαρχιακή οδός Δριμίσκου-Ασωμάτων) et on atteint la sortie des gorges de la Kourtaliotis ; en franchissant les deux ponts sur la rivière de Kissos et sur la rivière Kourtaliotis, on rejoint Assomatos et on continue vers Plakias.

Mourné, qui était autrefois entouré de nombreux hameaux dont il ne reste que les églises, est, de nos jours, la seule localité de sa communauté locale (Κοινότητα Μουρνές). La localité compte un peu plus de 150 habitants qui vivent principalement de l’agriculture et de l’élevage sur ces terres très bien irriguées. Le toponyme de Mourné dériverait du nom du mûrier (μουριά) (Morus nigra), l’arbre dont les feuilles sont utilisées pour l’élevage du ver à soie, la chenille du bombyx du mûrier (Bombyx mori).

Les principales attractions touristiques de Mourné sont ses vieilles églises qui conservent des fresques anciennes :

• à l’entrée nord-ouest du village, sur la route de Myxorrouma, se trouve l’église Sainte-Irène (Αγία Ειρήνη) ; il s’agit d’une église à deux nefs ; la nef du côté nord recèle des fresques datées du XIVe siècle, notamment une fresque représentant l’évêque saint Blaise (Άγιος Βλάσιος).
• dans le cimetière, situé au sud-ouest du village, on peut voir l’église Saint-Georges (Άγιος Γεώργιος), une église à nef unique qui recèle également des fresques datées du XIVe siècle ; ces fresques représentent des scènes de la vie de saint Georges, notamment son martyre, ainsi que des scènes de la Seconde Parousie du Christ (Δευτέρα Παρουσία), comme la scène où la mer rend ses morts.
• dans le sud-ouest du territoire de Mourné, dans le hameau abandonné de Malathré (Μαλαθρέ), un peu avant d’arriver au village de Frati et près de l’entrée des gorges de Frati, on peut découvrir les ruines d’un monastère dédié à saint Georges. Dans les ruines de l’église d’Agios Georgios on peut encore voir d’anciennes fresques.

L’entrée des gorges de Frati se trouve à environ 500 m à l’est du village de Frati, village qui a donné leur nom aux gorges, qui est construit au pied du versant nord du mont Xiron ; le mont Xiron (Ξηρό όρος), c’est-à-dire la « montagne sèche », est parfois nommé montagne de Frati (Φρατιανό όρος). Les gorges de Frati sont nommées en grec « gorges fratiennes » (Φρατιανό φαράγγι).

Les gorges de Frati sont les gorges de la rivière de Kissos (Κισσανό φαράγγι) dans le cours inférieur de cette rivière. La rivière de Kissos prend sa source sur le plateau du Gious Kampos et traverse d’autres gorges nommées « gorges de Kissos » sur le flanc sud du mont Kédros, près du village de Kissos ; la rivière s’oriente vers le nord-ouest et draine, sur sa rive droite, les eaux des gorges d’Agia Fotia, puis celles des sources de Spili, et, sur sa rive gauche, les eaux du ruisseau de Vatos ; la rivière contourne ensuite, par le nord, le village de Mourné, s’oriente vers le sud-ouest près de Mixorrouma (Μυξόρρουμα), puis s’engage dans les gorges de Frati, à environ 2,7 km, à vol d’oiseau, au sud-ouest de Spili.

Les gorges de Frati ont une longueur d’environ 2,5 km et un dénivelé d’environ 130 m, et sont orientées dans la direction nord-nord-est - sud-sud-ouest, presque parallèles aux gorges de la rivière Kourtaliotis situées à seulement 1,5 km à l’ouest. À la sortie des gorges, la rivière de Kissos prend le nom de rivière Bourtzoukos (Μπουρτζούκος) ; à moins d’1 km après la sortie des gorges, un vieux pont permet à la route d’Assomatos à Drimiskos de franchir la rivière Bourtzoukos.

Peu après le pont, la rivière Bourtzoukos conflue avec la rivière Kourtaliotis, près de Kato Prévéli, pour former le fleuve Mégalopotamos (Μεγαλοπόταμος), c’est-à-dire la « Grande Rivière ». Le fleuve Mégalopotamos se jette dans la mer de Libye sur la plage de Prévéli, environ 2 km plus au sud.

Les gorges de Frati sont très escarpées et trop étroites pour être traversées par une route ou même une piste de terre ; il est possible de descendre les gorges de Frati à pied avec l’équipement et le savoir-faire de grimpeurs pour pouvoir franchir les cascades qui jalonnent les gorges.