Le village de Kéra se trouve un peu à l’écart de la route qui monte vers le plateau du Lassithi depuis Malia ou Chersonissos, à environ 45 km à l’est-sud-est d’Héraklion et 23 km d’Hersonissos ; quitter la route sur la droite 3 km avant d’atteindre le plateau. Le village est situé à environ 560 m d’altitude, sur le versant nord du mont Dicté.Aller à Kéra avec Google Maps (35.224564, 25.461673). Le village est surtout connu pour le monastère de Kéra (Μονή Κεράς) qui se trouve au-dessus du village, à côté de la route du plateau ; le monastère est situé à 615 m d’altitude, sur le versant occidental d’une colline plantée de cyprès, la colline de Carfi (Καρφί), d’où l’on peut admirer la vallée d’Avdou.
Le véritable nom du monastère est le monastère stavropégique de la Kardiotissa de Kéra (Ιερά Σταυροπηγιακή Μονή Καρδιωτίσσης Κεράς ou Μονή Κεράς Καρδιώτισσας). Dans l’église orthodoxe, un monastère stavropégique est un monastère qui dépend directement du patriarche de Constantinople et qui ne dépend pas de l’évêque local, ce qui lui confère certains avantages, financiers entre autres. Le monastère doit son nom à une très ancienne icône miraculeuse de la Vierge de Miséricorde, la « Panagia Kardiotissa » (Παναγία Καρδιώτισσα), dont l’original a été volé. L’église du monastère est dédiée à la Nativité de la Vierge (Γενέσιο της Θεοτόκου). La date de fondation du monastère n’est pas connue, mais le monastère remonte à la seconde époque byzantine de la Crète, entre les années 961 et 1204. Il semble que le monastère de Kéra était, à l’origine, rattaché au monastère d’Agarathos (Μονή Παναγίας Αγκαράθου) près d’Épiskopi. La construction s’est faite en quatre étapes à des époques différentes, notamment après des destructions par les Turcs. Pendant l’occupation ottomane, l’ensemble monacal a en effet servi d’école clandestine où étaient entretenus la foi orthodoxe et l’esprit patriotique. Pendant le soulèvement crétois de 1866 à 1867, le monastère fut le centre de la rébellion dans la métropole de Cherronisos (Χερρόνησος), l’ancien nom d’Hersonissos, et subit de dures représailles de la part des Turcs. Du fait de cette histoire tourmentée le catholicon du monastère a subi des changements structurels importants et présente une architecture complexe ; cette église principale était, à l’origine, constituée d’une nef unique recouverte d’un toit soutenu par des arcs ; elle fut ensuite agrandie par l’ajout de deux narthex à l’ouest et d’une petite chapelle latérale au nord. Le catholicon est la seule partie subsistante du monastère fortifié d’origine.
L’intérieur de l’église recèle des fresques de l’époque byzantine tardive, dont les plus anciennes seraient celles de la nef d’origine qui dateraient de la première moitié du XIVe siècle ; les autres dateraient de la fin du XIVe siècle et du XVe siècle. Les fresques sont parmi les mieux conservées de Crète car elles avaient été recouvertes de badigeon de peur qu’elles soient détruites par les Turcs ; les fresques ont été redécouvertes au début des années 1970. La porte sainte de l’iconostase date du début du XVIe siècle. La pièce maîtresse du monastère est l’icône qui lui a donné son nom, l’icône miraculeuse de la Panagia Kardiotissa à laquelle sont attachées de nombreuses légendes et traditions. Cette icône est attribuée à l’iconographe crétois Andrea Rizo (Ανδρέας Ρίτζος / Andréas Rítzos) qui l’aurait peinte vers 1492. L’icône fut volée par un marchand de vin grec en 1498 qui emporta l’icône à Rome où il mourut. Après quelques péripéties l’icône fut exposée à la vénération publique dans l’église Saint-Matthieu de Merulana (Chiesa di San Matteo in Merulana) en 1499 ; elle disparut en 1799 lorsque l’église Saint-Matthieu fut détruite par les troupes de le Ire République française de Bonaparte. En 1866 l’icône, vénérée comme l’icône de Notre-Dame du Perpétuel Secours (Madre del Perpetuo Soccorso), fut transférée dans l’église Saint-Alphonse à l’Esquilin (Chiesa di Sant’Alfonso all’Esquilino), située dans la même rue Merulana, où elle se trouve encore de nos jours. Une copie de l’icône, peinte en 1735, se trouve dans l’église du monastère ; elle est considérée comme tout aussi miraculeuse que l’originale. Les Turcs l’auraient volée et emportée à Constantinople à trois reprises, mais l’icône serait chaque fois revenue d’elle-même vers son église, guidée par des anges. La troisième fois les Turcs auraient attachée l’icône par une chaîne à une colonne de marbre, mais l’icône de la Vierge Marie serait revenue au monastère en emportant la colonne et la chaîne. Pour convaincre les incrédules la colonne est exposée dans la cour du monastère, entourée d’une clôture, et la chaîne se trouve dans l’église à côté de l’icône.
De nos jours le monastère de Kéra est un monastère de moniales qui compte quelques dizaines de religieuses. Le monastère accueille de très nombreux visiteurs en chemin vers le plateau du Lassithi. C’est le 8 septembre, jour où est fêtée la nativité de la Vierge Marie, que la foule est la plus nombreuse ; ce jour-là la route d’accès au monastère est encombrée d’automobiles sur des kilomètres.
Tarif d’entrée : 2 €. Horaires : de 10 h à 15 h (14 h le dimanche). Tenue correcte exigée. Pas de photographies dans l’église. |