La mosquée du pacha Véli est l’une des plus anciennes mosquées de Crète, construite par les Ottomans peu après leur conquête de la ville de Rettimo en 1646. La mosquée porte le nom de l’agha Véli qui était un des lieutenants du conquérant de Réthymnon, le pacha Hussein (Deli Hüseyin Paşa), qui sera nommé vizir de l’Empire ottoman par le sultan Mehmed IV en 1656. L’agha Véli deviendra lui-même pacha, d’où le nom de la mosquée. La mosquée du pacha Véli se trouve un peu en dehors de la vieille ville de Réthymnon, dans la quartier de Mastabas, ou Mastampas (Μασταμπάς) ; c’est en ce lieu que les Turcs s’étaient installés pour mettre le siège à la cité de Rettimo. La mosquée est parfois nommée mosquée de Mastabas (Τζαμί τού Μασταμπά). En 1646, Réthymnon fut assiégée et conquise par un important corps expéditionnaire ottoman ; à sa suite vinrent des derviches, c’est-à-dire des tenants du mysticisme soufi, dont les prières étaient censées renforcer le courage des soldats. Pendant le siège, une grande partie de l’armée, et les derviches qui l’accompagnaient, établirent leur camp à Mastabas, d’où ils entrèrent effectivement dans la ville de Rettimo. Après la conquête de la ville, le cheikh Moustapha, qui appartenait à la Qadiriyya, la confrérie soufie de Qadir (Kadiriye Tarikatı), fit construire sur le site de Mastabas un tekké (tekke), c’est-à-dire une sorte de monastère où les derviches pouvaient séjourner et pratiquer leur spiritualité ; le tekké fut construit à l’emplacement d’un monastère, le monastère vénitien Saint-Onuphre (Άγιος Ονούφριος). L’agha Véli entreprit de financer la construction du tekké et de sa moquée, qui prit plus tard son nom. La plus ancienne mention connue de la mosquée se trouve dans les archives du kadi (juge) de Réthymnon de l’année 1651. Au fil des ans, beaucoup ont admiré et mentionné ce monument historique qui était un centre de pèlerinage pour les musulmans de Réthymnon. L’un d’eux fut le célèbre voyageur ottoman Evliya Celebi (Evliyâ Çelebi) (1611-1682), qui a beaucoup voyagé à travers l’Empire ottoman et qui a relaté ses voyages. Evliya Celebi écrit que le tekké du pacha Véli était l’une des trois fondations de Réthymnon qui, nuit et jour, fournissaient de la soupe aux riches et aux pauvres, aux vieux et aux jeunes ; c’est-à-dire que les derviches du tekké tenaient une soupe populaire (İmaret). L’emprise de l’ancien tekké, établi sur un terrain en faible pente, comprend : la mosquée au sud, huit cellules voûtées à l’ouest et un bâtiment à deux étages au nord. La mosquée est de plan presque carré, de 16,6 m par 16,2 m, et appartient au type à plusieurs dômes avec un portique. La mosquée est couverte par six petits dômes soutenus par un réseau d’arcs brisés et de trompes (voûtes tronquées), disposés en deux rangées de trois dômes selon un axe nord-ouest–sud-est. Le portique est placé devant la face nord-ouest de la mosquée et se compose d’une arcade ouverte avec trois arcs en ogive couverts par trois dômes. La forme des arcs peut être associée aux maçons locaux, préservant l’expression architecturale vénitienne. L’accès à l’intérieur du bâtiment carré se fait par une imposante entrée en pierre calcaire locale sculptée de motifs végétaux en relief qui proviendrait d’une église voisine du Borgo, abandonnée lors du siège ottoman de Réthymnon. Du côté ouest s’ouvre la porte menant à l’escalier montant au minaret, avec un palier accessible depuis un escalier en pierre. Chaque face du bâtiment, à l’exception de celle de l’ouest, est percée de deux fenêtres rectangulaires. Au milieu du mur sud-est se dresse le mihrab, la niche de prière musulmane, orientée vers La Mecque. Le minaret se dresse à l’angle nord-ouest du bâtiment et n’a qu’un seul balcon circulaire. Selon son inscription, il a été construit en l’an 1204 de l’Hégire, c’est-à-dire en 1789-1790 après JC ; ce serait le minaret le plus ancien de Réthymnon. L’inscription est la suivante : « Qu’elle soit à l’épreuve des malédictions ! Gloire et gratitude au Seigneur… Nous avons fait une donation et restauré le minaret pour que l’Adhan (Ezan) [c’est-à-dire l’appel à la prière] soit entendu, et pour la charité de Dieu. » Dans la partie ouest de la cour du tekké, sur un terrain plus élevé, sont disposées les huit cellules identiques voûtées qui servaient d’habitations aux derviches. Le bâtiment à deux étages formant une extension du côté nord est architecturalement sobre et servait vraisemblablement de résidence au cheikh du tekké et de cuisine. La fontaine était située à l’entrée de l’enceinte, car elle était essentielle pour les ablutions rituelles requises avant la prière. La mosquée du pacha Véli fut très endommagée par les bombardements allemands en mai 1941. Visite de la mosquée du pacha Véli (Τζαμί Βελή Πασσά) : La mosquée se trouve à environ 450 m au sud-est de la Grande Porte de la Vieille ville, dans un triangle bordé par la rue Sathas, la rue Markellos et la rue de la République (οδός Σαθά, Οδός Μαρκέλλου & Οδός Δημοκρατίας) ; elle est assez difficile à trouver : Aller à la mosquée du pacha Véli avec Google Maps (35.363953, 24.477746). |