| La cathédrale Saint-Domnius de Split en Croatie | |
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| La cathédrale Saint-Domnius se trouve à l’intérieur des murs du Palais de Dioclétien sur le côté est du Péristyle, près de l’endroit où se croisait les deux voies principales du Palais, le cardo et le decumanus. La place située en face de la cathédrale Saint-Domnius dans la vieille ville de Split, que l’on nomme aujourd’hui le Péristyle (Peristil), se nommait autrefois Place Saint-Domnius (Pločata Svetog Dujma). |
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| La cathédrale de Split | C’est en 650 que le mausolée de Dioclétien fut transformé en église par Jean de Ravenne (Johannes de Ravenna) venu en Dalmatie pour réorganiser la communauté chrétienne réfugiée dans le Palais de Dioclétien à Spalatum après la chute de Salona en 614. La nouvelle église fut d’abord consacrée à Notre-Dame de l’Assomption. Dans le but d’éliminer les idoles païennes, le temple de Jupiter fut, lui, transformé en baptistère. Jean Ier de Ravenne (en croate Ivan Ravenjanin) fut nommé archevêque de Split après un interrègne de onze années. Depuis Salone, il fit transporter dans l’église les reliques des saints martyrs des habitants de Salone, saint Domnius (Sveti Dujam) et saint Anastase (Sveti Anastazije) ; bientôt l’église cathédrale fut consacrée à saint Domnius, saint patron de la ville ; le sarcophage impérial de Dioclétien fut déplacé dans l’une des tours du Palais. Une sorte de vengeance posthume contre l’ex-empereur qui avait été l’un des plus féroces persécuteurs des chrétiens et qui avait fait décapiter Domnius en l’an 304. Jean de Ravenne mourut à Split vers 680. La forme originelle du mausolée – un octogone surmonté d’un dôme et entouré par une arcade de 24 colonnes corinthiennes – a été presque entièrement préservée : cependant, la construction d’un campanile à partir du XIIe siècle amena la destruction du porche et, au XVIIe siècle, un chœur fut accolé du côté est du mausolée. |
| Le portail | On pénètre dans la cathédrale par une arche gardée par deux lions romans ; ces lions portent sur leur dos un ensemble hétéroclite de personnages, dont Maria Lascaris, l’épouse d’origine grecque du roi de Hongrie Bela IV, qui se réfugia, devant l’invasion des Tatars, dans une forteresse située près de Klis. L’entrée est surtout remarquable par sa lourde porte de bois de chêne et de noyer dont les deux battants sculptés représentent 28 scènes de la vie du Christ, dans un style byzantin naïf – proche des bandes dessinées d’aujourd’hui – compréhensible par les populations illettrées de l’époque. Les 14 caissons du vantail de gauche illustrent la vie du Christ de sa naissance à la résurrection de Lazare ; les 14 caissons du vantail de droite couvrent la Passion et l’Ascension. Les caissons sont séparés par de riches ornements de bois. À l’origine, les battants étaient de couleur rouge et les personnages dorés. Ces bas-reliefs sont une œuvre, datée de 1214, d’un sculpteur et peintre local, Andrija Buvina ; elles sont considérées comme l’un des joyaux de la sculpture médiévale romane, et sont parmi les œuvres les plus anciennes de la cathédrale. Les sculptures sont éraflées et grattées dans les parties basses – qui sont protégées par une vitre – mais sont en très bon état dans les parties supérieures. |
| Le dôme | L’intérieur – assez restreint – de la cathédrale est de plan circulaire et coiffé d’un dôme reposant sur huit colonnes à chapiteaux corinthiens. Ce dôme, symbolisant la nature divine de l’empereur, devait à l’origine être décoré de mosaïques dorées. L’intérieur a été purgé de sa décoration païenne, mais recèle toujours des bas-reliefs de Dioclétien et de son épouse Prisca sur une frise située à la base du dôme. Le reste de la décoration témoigne de la succession des styles à travers les siècles : un mélange d’art roman, de sculptures gothiques et Renaissance et de peintures baroques. |
| La chaire (Propovjedaonica) | La première œuvre que l’on rencontre sur la gauche – en parcourant l’intérieur de la cathédrale dans le sens horaire – est une monumentale chaire de pierre richement décorée, exécutée dans le style roman tardif (XIIIe-XIVe siècle). C’est une chaire hexagonale fermée par une arcade aveugle formée de doubles colonnes de marbre multicolore avec des chapiteaux finement ouvragés. La chaire repose sur six colonnes élancées aux chapiteaux mêlant des feuillages, des serpents et des bêtes étranges. |
| L’autel Saint-Domnius (Oltar Svetog Dujma) | En poursuivant dans le sens horaire autour de l’église, le monument suivant est l’autel de saint Domnius, situé dans la chapelle nord. C’est un autel baroque réalisé en 1766 et en 1767 par le sculpteur et le constructeur d’autel bien connu de Venise, Giovanni Maria Morlaiter (1699-1781). L’autel se compose d’un sarcophage et d’un reliquaire soutenu par des figures féminines allégoriques de la Foi et de la Constance. L’antependium de l’autel montre en bas-relief le martyre du premier évêque de Salone, décapité en 304. Le plafond de la chapelle est occupé par une série de huit peintures de scènes de la vie de la Vierge (M. Capogrosso, XVIIe siècle). |
| La chapelle Saint-Anastase (Kapela Svetog Staša) | L’autel Saint-Anastase (Oltar Svetog Anastazija) se trouve dans la chapelle du nord-est ; il est consacré à saint Anastase (sveti Anastazije ou sveti Staš), un chrétien contemporain de Domnius, martyrisé comme lui par Dioclétien et, comme lui, saint patron de Split. Anastase était un marchand de drap d’Aquilée, près de l’actuelle Venise, qui s’était établi à Salone ; il avait peint une croix sur la porte de sa boutique, et, comme le christianisme était interdit à cette époque, il fut arrêté et noyé, en étant jeté dans la rivière Jadro avec une meule de pierre autour du cou. L’autel, placé sous un dais en drapé de pierre magnifiquement sculpté, comporte un sarcophage conservant les ossements du saint. Sur le devant, le sarcophage porte un bas-relief cruellement réaliste, la « Flagellation du Christ », montrant Jésus flagellé et brutalisé par des persécuteurs particulièrement rustres ; au-dessus, le gisant de saint Anastase garde près de lui une meule de pierre figurant son martyre. L’autel de saint Anastase fut réalisé par le maître Georges le Dalmate (Juraj Matejev Dalmatinac) en 1448, soit quelque vingt ans après l’autel de saint Domnius réalisé par Bonino ; Georges le Dalmate conserva le concept et la forme de l’œuvre de Bonino. Pour la qualité exceptionnelle de la sculpture, en équilibre avec les éléments décoratifs, et l’habileté artistique de Juraj Dalmatinac, le bas-relief de La « Flagellation du Christ » est considéré comme l’une des plus belles œuvres sculpturales de style gothique tardif et Renaissance de son temps, et un des sommets de l’art croate. |
| La chapelle Saint-Domnius (Kapela Svetog Dujma) | En continuant dans le sens horaire, on rencontre, après avoir passé le maître-autel, la chapelle Saint-Domnius située dans l’angle sud-est de la cathédrale. Cette chapelle abrite un second autel consacré à saint Domnius ; cet autel du XVe siècle se compose d’un ancien sarcophage paléochrétien, qui sert de base, surmonté d’un second sarcophage qui a conservé autrefois les ossements de saint Domnius, d’abord enterré à Salone, puis transféré ici au IXe siècle ; ce second sarcophage est lui-même surmonté d’un gisant du saint et martyr. L’ancien sarcophage paléochrétien porte un bas-relief représentant un homme avec des chiens de chasse. Le second sarcophage et le gisant sont l’œuvre du maître sculpteur milanais Bonino, réalisée en 1427 dans le style gothique tardif. Bonino da Milano, mort à Šibenik en 1429, est aussi l’auteur du portail de la cathédrale Saint-Jacques de Šibenik et de la colonne de Roland à Dubrovnik. La voûte au-dessus de l’autel est ornée de peintures murales – d’inspiration gothique – du peintre local Dujam Marinov Vušković (XVe siècle). |
| | | Le trésor de la cathédrale (Riznica) | Le Trésor de la cathédrale de Split se trouve au premier étage de la sacristie, un bâtiment construit au sud-est de l’ancien mausolée ; on y accède depuis le chœur par une volée de marches sur la droite. Le Trésor conserve, dans des bustes-reliquaires en argent, les reliques des trois saints martyrs et patrons de Split : le grand reliquaire de saint Domnius (sveti Duje) et ceux de saint Anastase (sveti Anastazije) et de saint Rainier ou Arnerius (sveti Rajnerije ou Arnir), un archevêque de Split qui fut lapidé à mort en 1180 par la famille de pirates de la Neretva, les Kačić. Le Trésor possède aussi une collection d’objets d’art sacrés datant du haut Moyen Âge au XIXe siècle : objets liturgiques, missels manuscrits, vêtements sacerdotaux précieux ainsi qu’un tableau de style roman du XIIIe siècle « La Vierge et l’Enfant ». Parmi les manuscrits, les pièces les plus précieuses sont l’évangéliaire de Split (Splitski Evanđelistar), un manuscrit enluminé du VIe siècle, le cartulaire de Supetar (Cartularium) du XIe siècle, et une « Histoire Salonitaine » (Historia Salonitana), histoire du peuple de Salone et chronique de l’église de Split, un manuscrit richement décoré écrit au XIIIe siècle par l’archidiacre de Split, Thomas (Toma Arciđakon). L’Historia Salonitana est l’une des plus importantes sources historiques du Moyen Âge pour l’étude de l’histoire de Split et de l’ensemble de la Dalmatie. |
| La crypte Sainte-Lucie (Kripta Svete Lucije) | La crypte Sainte-Lucie est située sous la cathédrale de Split et présente le même plan circulaire que l’église. La crypte est dédiée à sainte Lucie de Syracuse (sveta Lucija), l’une des dernières victimes des persécutions chrétiennes sous le règne de Dioclétien, vers 304 après JC. Selon le martyrologe, cette jeune chrétienne, fille d’une noble et très riche famille de Syracuse, aurait voué sa vie à Dieu, mais sa mère l’avait promise à un jeune homme ; celui-ci apprenant son vœu de chasteté et voyant la dot lui échapper, dénonça Lucie aux autorités romaines alors que les persécutions contre les chrétiens faisaient rage. Lucie se serait arraché les yeux de désespoir et les aurait envoyés à son fiancé sur un plateau ; après de longues torture, les persécuteurs des chrétiens lui auraient enfoncé une épée dans la gorge (sainte Lucie est parfois invoquée contre les maux de gorge …). Par miracle, la Vierge Marie lui aurait rendu de plus beaux yeux ; c’est la raison pour laquelle sainte Lucie est la protectrice des aveugles ; elle est fêtée le 13 décembre, date à laquelle l’heure du coucher du soleil recommence à augmenter, la durée du jour continuant à décroître jusqu’au 25 décembre. C’est aussi la raison pour laquelle la crypte – symbole de l’obscurité – de l’ancien mausolée de Dioclétien – le persécuteur des chrétiens comme sainte Lucie – fut consacrée à cette sainte. Dans la crypte, une source miraculeuse est censée rendre la vue ; le 13 décembre est une fête importante dans la tradition chrétienne locale : la crypte est ouverte au public, une messe est dite, la source d’eau est bénie, et chacun peut emporter un peu de l’eau bénite. |
| Le campanile (Zvonik) | Le campanile de la cathédrale – emblème de la ville de Split – est situé entre l’église et le Péristyle : sa construction, commencée au XIIIe siècle, nécessita la démolition du porche d’origine du mausolée de Dioclétien. Cette construction de six étages, à l’origine de style roman tardif, dura plus de 300 ans et ne s’acheva pas avant le XVIe siècle ; les étages supérieurs, ajoutés plus tard, étaient en style gothico-Renaissance. Malheureusement, le campanile s’effondra vers la fin du XIXe siècle et dût être reconstruit entre entre 1890 et 1906. Les étages supérieurs furent reconstruits en style néoroman. La plupart des sculptures romanes originelles ont disparu ; cependant on peut encore admirer – au premier niveau, de part et d’autre – les bas-reliefs de l’Annonciation et de la Nativité, avec la Vierge abritée par un rideau ; ils datent de la construction d’origine au XIIIe siècle et sont attribués au maître Radovan qui travaillait à Trogir à cette époque. Les bas-reliefs moins raffinés représentant saint Anastase, saint Domnius et saint Pierre, portent la signature de maître Otto, un sculpteur d’origine nordique ; la scène de chasse dans l’arche de la voûte du campanile est aussi attribuée à ce sculpteur. | | La hauteur du campanile est de 60 mètres ; depuis le sommet on peut profiter d’une vue panoramique sur Split et, bien au-delà, sur les îles de Šolta et de Brač, la colline de Marjan, le massif du Mosor à l’est, et celui de Kozjak à l’ouest. On peut même tenter de discerner le périmètre et le plan romain du palais de Dioclétien parmi le fouillis des constructions ultérieures. | |
| La chapelle Saint-Roch (Crkvica Svetog Roka) | Au nord du péristyle se trouve une petite chapelle Renaissance, construite à partir de 1516, la chapelle Saint-Roch (Crkvica Svetog Roka) ; elle héberge de nos jours le Centre d’information touristique. |
| Le baptistère (Krstionica) | Le baptistère de la cathédrale de Split se trouve – par rapport à l’église – de l’autre côté du Péristyle. Il s’agit de l’ancien Temple de Jupiter du Palais de Dioclétien ; le temple romain fut transformé en baptistère vers le VIIe siècle, après l’arrivée des chrétiens réfugiés de Salone. La crypte située sous le plancher du temple (podium) fut transformée en une minuscule chapelle dédiée à saint Thomas. Le baptistère Saint-Jean n’a pas conservé le porche du temple d’origine, mais en a conservé le corps (cella) et, en particulier, sa remarquable voûte en berceau à caissons. Au XIe siècle, cette voûte avait été surmontée d’un clocher roman, comprenant trois étages, mais ce clocher fut démoli vers 1840 suivant la tendance néo-classique de l’époque. Au début du XXe siècle, en 1907, on a abattu quelques maisons, situées sur les côtés ouest et sud, afin de dégager le bâtiment ; cependant il subsiste des constructions appuyées contre le temple dans l’angle nord-ouest. | À l’intérieur, de nouveaux fonts baptismaux furent construits au XIIe siècle ; ces fonts baptismaux ont la forme d’une croix et une taille imposante, car, aux débuts du christianisme, le baptême se donnait par immersion totale. Ils ont été réalisés avec des dalles de marbre récupérées d’une balustrade d’un autel plus ancien, daté du XIe siècle. Ces dalles sont sculptées de bas-reliefs ; un des bas-reliefs représente un pentagramme surmonté d’un tressage d’osier (pleter), mais le plus intéressant est celui de la dalle de devant : il représente un roi croate médiéval assis sur un trône et piétinant un personnage qu’on pense représenter un démon ou un ennemi païen. Le style du bas-relief suggère une période d’exécution qui pourrait correspondre au roi Dmitar Zvonimir. Détail intéressant : au-dessus des deux personnages court un motif à volutes plissées connu sous le nom de pluteus (plutej) ; c’est un motif typique de l’époque romane croate qui a ensuite été adopté comme symbole national : on peut voir ce motif sur les bandes des casquettes des policiers croates. | À l’intérieur du baptistère sont conservés deux sarcophages où ont été enterrés les archevêques de Split Jean de Ravenne (Ivan Ravenjanin, † 680), le fondateur du diocèse dans la nouvelle ville, et Laurent le Dalmate (Lovro Dalmatinac) (1059-1099), conseiller du roi Zvonimir, qui était à la tête de l’église de Split à l’époque des souverains nationaux croates. Le sarcophage de Jean de Ravenne est décoré d’une fleur de lys en relief. Juste derrière les fonts baptismaux se trouve une statue représentant un saint Jean-Baptiste étique ; cette grande statue en bronze est une œuvre tardive d’Ivan Meštrović réalisée en 1954. |
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| Personnages | Saint Domnius (Sveti Duje) | Domnius est né à Antioche en Syrie. S’étant établi à Salone (Salona), la capitale de la province romaine de Dalmatia, aujourd’hui près le la ville de Solin dans la banlieue de Split ; Domnius y devint prêtre et fut nommé évêque en 384, le premier évêque de la ville. Vers 303, craignant que le pouvoir quasi divin des empereurs romains ne fut sapé par l’influence des chrétiens – qui refusaient de sacrifier au culte des dieux païens de la religion officielle – l’empereur Dioclétien déclencha une campagne de persécutions contre eux. L’évêque Domnius et sept autres chrétiens furent torturés, et Domnius décapité, dans l’amphithéâtre de Salone, le 10 avril 304. Son corps fut enterré dans le cimetière nord de la ville. Lorsque les habitants de Salone durent fuirent leur ville, en 614, devant l’invasion des Avars et des Slaves, ils s’installèrent à Split et proclamèrent Domnius saint patron de la ville (Sveti Duje ou Sveti Dujam). La cathédrale lui fut consacrée. Le 7 mai est le jour de sa fête et donne lieu à la plus grande célébration de la ville, avec messe en plein air et processions. |
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| Conditions de visite | Horaires de visite de la cathédrale : en juillet et en août, tous les jours de 8 h à 20 h ; de septembre à juin, de 8 h à 12 h et de 16 h 30 à 19 h. Tarif d’entrée : 5 kunas ; trésor de la cathédrale : 5 kunas. Tenue correcte exigée … Horaires de visite du campanile : de mai à septembre, de 9 h à 19 h ; d’octobre à avril, de 9 h à 12 h. Tarif : 5 kunas. |
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