Les visiteurs pénètrent dans une belle salle pavée de galets formant festons et guirlandes. L’escalier baroque en pierre, datant des années 1750, est flanquée de candélabres dorés. Le Musée d’Art Sacré est indéniablement le plus beau musée de Madère. Sa collection comprend des objets issus des églises et monastères de l’île : de précieuses robes, des croix arborées lors de processions, des ustensiles liturgiques et des statues de saints. Cette collection d’orfèvrerie religieuse comprend beaucoup de pièces fondues à Funchal avec l’or et l’argent rapportés des Amériques. La croix de procession du XVIe siècle, offerte à Madère par Manuel Ier, constitue le clou de cette section. Ses collections de primitifs portugais des XVe et XVIe siècle et surtout flamands méritent absolument une visite : elles sont considérées comme les plus précieuses du Portugal et pour certains des plus beaux chefs-d’œuvre flamands jamais peints. En visitant la section des primitifs, au deuxième étage du musée, on est étonné par l’abondance d’œuvres flamandes signées des plus grands noms (Roger van der Weyden, Dirk Bouts, Gerard David et Hans Memling). Ces tableaux furent achetées par les riches marchands de sucre de Funchal qui, au XVIe siècle, commerçaient avec Anvers, Bruges et Malines et échangeaient leur « or blanc » contre les principaux trésors artistiques de l’époque. Les commerçants et les propriétaires de plantations cherchaient l’immortalité par le don de retables pour les églises locales ; ces tableaux les dépeignaient souvent eux-mêmes et leurs familles à genoux dans la prière. Ainsi, les tableaux magnifiquement colorés réunis dans ce musée d’art religieux servent aussi de portraits de quelques-uns des premiers colons de l’île. Les couleurs sont aussi vives que si elles venaient d’être peintes et, sur la plupart de ces toiles, les magnifiques détails qui entourent le sujet principal sont d’un intérêt presque égal au sujet lui-même. On ne peut que s’étonner devant ces trésors de l’école flamande dont Madère est redevable au commerce du sucre. Les fruits de l’expansion des relations commerciales de l’Europe apparaissent aussi dans ces peintures, comme ce tableau, peint vers 1515, où les pieds de la Vierge Marie reposent sur un tapis d’Orient, et les lys symbolisant sa pureté sont dressés dans un vase de Delft. Dans le triptyque « Saint Jacques le Mineur et saint Philippe » par Pieter Coecke van Aelst, les commanditaires de l’œuvre, représentés à genoux de chaque côté du panneau central, ont été identifiés comme étant Simão Gonçalves de Câmara, petit-fils de Zarco, et sa femme Isabel. L’œuvre du XVIe siècle de l’école d’Anvers « Saint Joachim et sainte Anne », est réputée représenter le roi Ladislas III de Pologne et son épouse Senhorina Eanes. Connu comme Henri l’Allemand, le roi avait renoncé à sa couronne et était devenu agriculteur à Madère en 1454. L’« Adoration des Rois Mages », du début du XVIe siècle (vers 1518), décorait jadis l’église de Machico ; riche en détails, cette peinture anonyme représente les commerçants et les propriétaires de Madère sous le couvert des trois Rois mages, avec leurs serviteurs. Suivant la tendance maniériste, le peintre anonyme a mis l’accent sur les caractéristiques faciales : un grand nez ou un double menton, afin de donner plus de caractère à ses sujets. Certains panneaux présentent des peintures sur les deux faces, comme ce triptyque de la « Descente de Croix » attribué à Gerard David avec, au dos, une « Apparition du Christ à Marie ». Remarquer aussi une « Adoration des Bergers » provenant de l’église de Ribeira Brava, une « Sainte Marie-Madeleine » somptueusement vêtue, attribuée à Jan Provoost, un « Saint Sébastien », une « Dernière Cène », un « Saint Jacques le Majeur » attribué à Dieric Bouts, un triptyque de l’« Annonciation » attribué à Joos van Cleve. |