La muraille hellénistique | La cité bâtie par Lysimaque à l’époque hellénistique, au IIIe siècle après JC, était entourée de murailles massives, d’une hauteur de 10 m et d’une épaisseur de 2,5 à 3 m, construites en pierre de taille (n° 17). La longueur des murs est estimée à environ 9 600 m ; la superficie de la ville fortifiée était de 615 hectares. La muraille était renforcée, à de courts intervalles, par des tours de guet rectangulaires. Au nord-est, depuis la porte de Magnésie, la muraille de Lysimaque s’étendait sur les flancs est et nord-est du mont Pion (Panayir Dağı), puis redescendait au nord jusqu’à la porte de Koressós et le stade, puis jusqu’au port et la porte du Port. Au sud-ouest la muraille escaladait les pentes du mont Préon (Bülbül Dağı) jusqu’au sommet, puis suivait la crête du promontoire jusqu’à la mer – encore présente à cette époque – puis revenait vers le port en suivant la rive sud de l’estuaire du fleuve Caystre. Sur cette section de la muraille se trouve une grande tour carrée à deux étages – visible depuis Éphèse – qui était une forteresse surveillant l’entrée du port ; cette tour est surnommée – à tort – la « prison de saint Paul », bien que ce dernier n’y ait jamais été emprisonné. Les vestiges de la muraille hellénistique sur le mont Préon sont assez bien conservés et peuvent être aperçus depuis la route menant à la Maison de Marie ; la muraille du nord, sur le mont Pion, est moins bien préservée. En randonnée pédestre, on peut atteindre la muraille du nord depuis la route D515 qui quitte Selçuk par l’ouest : en laissant le chemin qui part sur la droite vers l’Artémision, on prend sur la gauche – au niveau d’un petit cimetière – un chemin qui rejoint la petite route asphaltée qui relie les deux entrées du site archéologique ; sur la gauche, cette route conduit à la grotte des Sept Dormants, à 50 m ; depuis la grotte des Sept Dormants on peut rejoindre la muraille de Lysimaque et la longer sur la droite jusqu’à la muraille byzantine qui suit la ligne de crête et offre une vue époustouflante sur le site d’Éphèse. |
| La « tombe de saint Luc » | À 250 m au sud-est de l’agora d’État se trouve les fondations d’un bâtiment de forme circulaire mis au jour par l’archéologue John Turtle Wood en 1865 (n° 68). Il s’agit à l’origine d’une fontaine datant du IIe siècle après JC. Au IVe ou au Ve siècle ce bâtiment a été converti en église avec une crypte accessible par deux escaliers ; les pilastres encadrant l’entrée de l’escalier sud présentent des bas-reliefs décorés de bœufs et de crosses. Il n’en a pas fallu davantage pour que cette crypte fût surnommée « tombe de saint Luc » parce que le bœuf était le symbole de ce saint évangéliste. |
| Le gymnase et les thermes de Vedius | Le gymnase de Vedius est le premier bâtiment que le visiteur peut apercevoir lorsqu’il arrive près de l’entrée inférieure du site archéologique d’Éphèse par la route D515 reliant Selçuk à Kuşadası ; les ruines du gymnase se trouvent sur la gauche de la route, 500 m avant le parking inférieur et les guichets d’entrée ; les ruines du gymnase sont situées en dehors de la zone payante mais sont entourées d’une clôture. Le gymnase de Vedius se trouvait à côté du stade, tout au nord de la cité antique, à proximité de la porte de Koressós (n° 19) ; dans l’antiquité le gymnase était désigné sous le nom de « Gymnasium in Coresso » pour le distinguer des quatre autres gymnases que comptait la cité. Le gymnase était situé au pied du versant nord-ouest du mont Pion, contre la muraille d’enceinte de la ville. Ce gymnase avait été créé au milieu du IIe siècle après JC, vers l’année 147, par un riche bienfaiteur éphésien, Marcus Claudius Publius Vedius Antoninus Phaedrus Sabinianus (Vedius pour faire court …), et son épouse Flavia Papiana. Publius Vedius Antoninus avait dédié l’édifice à la déesse Artémis et à l’empereur Antonin le Pieux (Antoninus Pius, règne de 138 à 161) dont il était l’ami. Le gymnase fut rénové vers 400 après JC et resta en service jusqu’à la fin du Ve siècle ; il fut détruit par un incendie au VIe siècle. Les gymnases étaient des centres d’éducation physique, intellectuelle et artistique qui comportaient des salles d’exercice, des salles de conférence et des salles de bain. Le gymnase de Vedius était le plus vaste de tous ceux de la cité, avec une longueur de 135 m et une largeur de 85 m, soit une superficie de plus de 11 hectares ; il était orienté dans la direction est-ouest et avait un plan symétrique de part et d’autre de cet axe. L’entrée de l’établissement se trouvait dans la partie orientale de la façade sud, assez près de la porte de Koressós (n° 1 du plan) ; cette entrée se présentait comme un propylon carré (vestibulum), avec des niches abritant des statues sur les murs latéraux. Sur le côté gauche de l’entrée se trouvaient des latrines (latrinae) (n° 16), un bâtiment de 17 m de longueur qui comprenait une antichambre et une cour entourée de colonnades et des sièges en marbre. L’entrée ouvrait sur la palestre (palaestra), une grande cour rectangulaire – de 40 m de longueur par 50 m de largeur – entourée de portiques couverts (n° 2) ; la palestre se trouvait dans la partie est du gymnase. Dans la palestre se pratiquaient diverses disciplines sportives, en particulier la lutte ; les portiques servaient d’installations auxiliaires : vestiaires, entrepôts d’onguents et cetera. Sur le côté ouest de la palestre se trouvait une salle (n° 3), séparée de la palestre par une colonnade, aux murs ornés d’une somptueuse décoration architecturale et sculpturale. Cette salle servait probablement le culte impérial : le mur ouest contenait une niche semi-circulaire où aurait été placée la statue de l’empereur Antonin le Pieux, statue maintenant perdue ; devant cette niche, il y avait un petit autel. Des statues, comme celle d’Ándroclos, fondateur mythique d’Ephèse, de Dionysos et d’Asclépios, ainsi qu’une copie du Discobole de Myron, proviennent de la statuaire de la décoration intérieure. La salle impériale était flanquée de deux salles carrées plus petites, accessibles depuis la palestre, qui servaient d’antichambres et communiquaient avec une salle oblongue, l’ambulacrum. L’ambulacrum (n° 4) était une galerie, avec une voûte en berceau, qui s’étendait sur toute la largeur du bâtiment ; il constituait la zone de séparation entre la palestre et les thermes, et servait sans doute de lieu de rencontre et de vestiaire (apodyterium). Dans la partie ouest de la galerie se trouvait une salle rectangulaire (n° 5) qui contenait une grande piscine non chauffée (natatio frigida), qui était décorée de statues de dieux fluviaux. L’ambulacrum et la piscine communiquaient vers l’ouest avec deux salles oblongues, identifiées comme des vestiaires (apodytorium) (n° 6). Ces salles flanquaient une zone centrale carrée, qui abritait également deux bassins pour le bain froid (frigidarium) (n° 7) au nord et au sud. Le vestibule central donnait accès au tepidarium (10), une salle de bain tiède qui servait de transition entre les salles de bains froids et les salles de bains chauds. Les installations chauffées étaient situées dans la partie ouest du bâtiment, pour profiter pleinement de la lumière naturelle et de la chaleur du soleil pendant l’après-midi ; elles contenaient le caldarium (n° 12), la salle chaude principale rectangulaire, qui était située au centre, et quatre salles secondaires auxiliaires, deux au nord et deux au sud (n° 10 et n° 11). La zone chauffée des thermes était chauffée par des hypocaustes, un type de système de chauffage par le sol et par des tubes d’argile placés à l’intérieur des murs. La sudatoria (n° 14) comprenait deux petites chambres de sudation de chaque côté. Les fouilles du gymnase de Vedius ont mis au jour de nombreuses statues dont certaines sont exposées au musée d’İzmir. |
| | Le stade | Le stade antique d’Éphèse se trouvait dans le quartier nord de la cité (n° 21), le quartier de Koressós, à l’extrémité de la rue du Théâtre qui prolongeait la voie de Marbre depuis le grand théâtre d’Éphèse, au centre-ville. Un peu plus au nord se trouvait le gymnase de Vedius ; entre ces deux édifices passait une rue conduisant à la Voie sacrée montante (ánodos) à travers la porte du Nord, ou porte de Koressós. De nos jours les vestiges du stade antique se trouvent près de l’entrée inférieure du site archéologique (Alt Kapı), à l’extérieur de la zone payante. Le stade a été construit en partie par le creusement d’une excavation artificielle au pied de la pente nord-ouest du mont Pion ; le stade avait une orientation ouest-est et occupait une superficie d’environ 3,3 hectares, avec une longueur de 229 m et une largeur de 28 m. La piste elle-même avait la longueur d’un stádion, soit 184 m. Le stade présentait une forme en fer à cheval, la courbe, ou sfendóni (σφενδόνη), se trouvant à l’est. Les gradins du sud étaient en partie creusés dans la pente de la colline. La construction initiale du stade d’Éphèse date du début de l’époque hellénistique, vers le IIIe siècle avant JC. Le stade comportait alors une simple piste de terre battue et des gradins en terre sur le côté sud. Au Ier siècle après JC, notamment sous le règne de l’empereur Néron (règne de 54 à 68 après JC), le stade fut embelli et agrandi : les gradins furent couverts de sièges en marbre et des gradins furent ajoutés sur le côté nord, construits sur une structure voûtée ; on accédait aux gradins du nord par deux escaliers extérieurs et une galerie souterraine voûtée, de 85 m de longueur et 2,9 m de largeur, ayant six ouvertures donnant sur la rangée supérieure de gradins. Les gradins étaient divisés en secteurs (kerkídes) par des escaliers étroits. Le stade d’Éphèse pouvait accueillir environ 70 000 spectateurs. Dans la partie occidentale du stade se trouvaient une porte monumentale et six autres entrées arquées. Quand la cité d’Éphèse fut abandonnée, au VIIe siècle après JC, le stade antique devint une carrière de pierres pour la construction de la forteresse d’Ayasoluk ou de la basilique Saint-Jean. Le stade d’Éphèse (stadyum) fut redécouvert en 1911, grâce à sa forme et à ses dimensions caractéristiques, mais les fouilles archéologiques du stade n’ont vraiment débuté qu’en 1993 et sont toujours en cours, notamment dans la partie ouest. Les vestiges du stade ne sont ouverts au public qu’à l’occasion de festivités telles que des tournois de combats de chameaux. Seules les galeries de circulation des gradins nord et les ruines de la porte monumentale de l’ouest sont identifiables. |
| Le macellum | À l’ouest du stade, de l’autre côté de la rue du Théâtre, et au nord du parc de stationnement, se trouve une petite colline, de 34 m de hauteur. Certains archéologues pensent que cette modeste colline est l’endroit où les Ioniens, conduits par Ándroclos, auraient fondé l’acropole de la nouvelle colonie, au Xe siècle avant JC ; dans le mythe fondateur d’Éphèse, cette colline était nommée « mont Tracheía » (Τραχεία, rugueux, crevassé). Cette acropole aurait été détruite, au VIe siècle avant JC, par les Lydiens du roi Crésus, forçant les Ioniens à s’installer dans un nouvel emplacement, près de l’endroit où se trouve le temple d’Artémis. Le plateau de cette colline porte les ruines d’un bâtiment de forme carrée, avec une cour à colonnade, qui est désigné comme un « macellum », un marché à la viande romain construit au IIe siècle après JC (n° 18), malgré une situation peu propice à ce genre d’activité. |
| La porte du Nord | La porte du Nord, ou porte de Koressós, se trouvait entre le gymnase de Vedius et le stade (n° 20) ; les processions sortaient de la ville par cette porte et empruntaient la Voie sacrée montante (ánodos) vers le temple d’Artémis. |
| | | La grotte des Sept Dormants | Au pied du flanc nord-est du mont Pion, un peu au sud du sanctuaire de Cybèle, se trouve une grotte à laquelle est attachée une légende chrétienne (n° 71), la grotte des Sept Dormants. La grotte des Sept Dormants se trouve sur la petite route qui relie les deux entrées du site archéologique d’Éphèse et qui est très fréquentée par les autocars de tourisme. On peut atteindre la grotte en quittant le site archéologique par la sortie inférieure et en empruntant la première route rencontrée sur la droite, 500 m après la sortie du parc de stationnement et juste après les ruines du gymnase de Vedius, à 250 m avant d’atteindre la route D515 reliant Kuşadası à Selçuk ; suivre ensuite les panneaux indicateurs sur 1,4 km jusqu’à la grotte. Depuis l’aire de stationnement gratuite de la grotte, marcher 200 m jusqu’à la grotte, le long du sentier qui monte sur la colline sur la droite. À pied, depuis l’une ou l’autre des entrées du site archéologique, il faut compter environ 20 min de marche. La légende raconte que, au milieu du IIIe siècle, sept jeunes chrétiens d’Éphèse se soient réfugiés dans cette grotte du mont Pion pour échapper aux persécutions antichrétiennes de l’empereur romain Dèce (Quintus Trajanus Decius, règne de 249 à 251) ; ils furent emmurés dans la grotte par les soldats romains lancés à leur poursuite. Les jeunes chrétiens s’endormirent mystérieusement et ne furent réveillés qu’un siècle et demi plus tard, en 418, sous le règne de l’empereur Théodose II (règne de 408 à 450). Le tremblement de terre, qui les avait réveillés, avait rouvert la grotte ; croyant n’avoir dormi qu’une nuit, ils partirent pour Éphèse où il furent très étonnés de voir que les persécutions avaient cessé et qu’il y avait des églises chrétiennes arborant la croix du Christ ; par un édit de 380 de l’empereur Théodose Ier, le christianisme était devenu religion d’État. Au tour des païens d’être persécutés … Quand les jeunes hommes moururent, ils furent ensevelis dans la grotte ; une chapelle fut édifiée et la grotte devint un lieu de pèlerinage byzantin. La légende des Sept Dormants d’Éphèse se répandit dans l’Europe chrétienne et fut reprise notamment par Grégoire de Tours. La grotte fut aménagée et les alentours servirent de nécropole pendant toute l’époque byzantine, avec plusieurs centaines de tombes. Des fouilles archéologiques, menées dans les années 1927 et 1928 ont mis au jour les vestiges de l’église byzantine, des tombes creusées dans la roche, ainsi que des peintures murales. La grotte des Sept Dormants (Yedi Uyuyanlar) a été clôturée à cause des dangers d’effondrement ; si on a la chance de trouver un gardien sur place on peut se faire ouvrir le portail, sinon on peut assez bien voir la grotte à travers le grillage. L’accès est gratuit, mais les gardiens acceptent volontiers les pourboires. |
| | Le temple d’Artémis | L’Artémision (Άρτεμίσιον, Artemisium) se trouvait au nord-est de la cité d’Éphèse de l’époque hellénistique, à environ 5 km du Prytanée – où brûlait la flamme éternelle – par la Voie sacrée montante (ánodos) (n° 74). Le temple d’Artémis (Άρτεμις) n’était pas situé sur une hauteur mais dans une plaine alluviale formée par les alluvions charriées par le fleuve Caystre, plaine qui était encore immergée vers l’an 1000 avant JC ; le temple se trouvait initialement – au VIe siècle avant JC – beaucoup plus proche qu’aujourd’hui de l’estuaire du fleuve. Aujourd’hui les rares vestiges du temple se trouvent à l’ouest de la ville de Selçuk, sur la droite de la route reliant Selçuk à Kuşadasi (Dr Sabri Yayla Bulvarı), 300 m après la sortie de la ville. La zone des ruines est toujours marécageuse et souvent partiellement inondée. Un premier sanctuaire a pu exister sur ce site dès la fin du VIIIe siècle avant JC ; ce premier temple aurait été détruit par une attaque des Cimmériens, vers 645 avant JC. Au début du VIe siècle avant JC, le temple détruit fut remplacé par un petit temple in antis avec une cella ouverte où se trouvait la statue de la déesse Artémis. Cependant ce petit temple fut rapidement remplacé par le premier Artémision archaïque, témoin de la richesse grandissante de la cité aux environs de l’an 560 avant JC. Mais c’est cette richesse qui attira la convoitise du roi de Lydie, Crésus, qui détruisit la ville d’Éphèse, déporta ses habitants dans l’arrière-pays, mais épargna le temple d’Artémis ; au contraire, le roi des Lydiens finança l’agrandissement du temple et offrit des colonnes. Le nom de Crésus est inscrit sur au moins un tambour de colonne qui est exposé au British Museum et l’Artémision archaïque est souvent nommé « temple de Crésus ». Ce temple archaïque du VIe siècle – construit exclusivement en marbre – était un splendide édifice avec des dimensions de 55 m par 115 m ; c’était un temple diptère, c’est-à-dire qu’il était entouré d’une double rangée de colonnes sur ses quatre côtés : il comportait 127 colonnes de marbre de 19 m de hauteur, cannelées et ornées de chapiteaux ioniens aux volutes peintes. La façade était tournée vers l’ouest. L’architrave monolithique de la façade pesait 24 tonnes ; c’était la première architrave en marbre du monde grec. Dans le pronaos se dressaient quatre paires de colonnes, les tambours les plus bas avec des bas-reliefs comme ceux de la façade d’entrée. L’architrave intérieure, les caissons de plafond, et les poutres de toit étaient en bois de cèdre. Les architectes de l’Artémision furent le Crétois Chersiphron (Χερσίφρων) et son fils Métagénès (Μεταγένης), mais il est possible qu’ils aient été aidés par Théodore de Samos (Θεόδωρος ό Σάμιος), l’architecte de l’Héraion de Samos. D’autres architectes leur ont succédé car on estime que le temple ne fut vraiment achevé que vers 460 avant JC. L’Artémision archaïque fut détruit par un incendie criminel le 21 juillet 356 avant JC : un certain Érostrate (Ήρόστρατος) avoua – sous la torture – avoir voulu, par ce geste, connaître la célébrité. Il se trouve que c’est ce même jour que naquit un petit Alexandre, qui deviendra grand. Les Éphésiens entreprirent immédiatement la construction d’un nouveau temple. À l’âge de 22 ans, en 334 avant JC, Alexandre le Grand chassa de la région les Perses de Darius III ; Alexandre proposa aux Éphésiens de couvrir tous les frais de reconstruction de l’Artémision, pourvu que son nom apparaisse sur l’inscription dédicatoire, mais ceux-ci déclinèrent l’offre ; cependant Alexandre confia au temple le tribut que la cité payait auparavant à Darius. Le nouveau temple conserva les dimensions de l’Artémision archaïque, mais sur une base un peu plus élevée, rehaussée par un podium de 2,68 m de hauteur et de 13 marches, probablement pour protéger le bâtiment contre les inondations fréquentes de cette zone marécageuse. La forme des anciennes bases de colonnes et leurs décorations sculpturales furent également conservées ; les colonnes de marbre avaient 20 m de hauteur et 1,20 m de diamètre. La cella abritait un autel de 32 m par 22 m, en forme de « U », et la célèbre statue de l’Artémis éphésienne à la poitrine couverte de multiples seins, ou d’œufs, symbolisant la vie et la fécondité de la Terre. La reconstruction fut dirigée par l’architecte Dinocrate de Rhodes (Δεινοκράτης ο Ρόδιος) et sa décoration fut réalisée par les plus grands artistes de l’époque, notamment le sculpteur Scopas (Σκόπας) et le peintre Apelles (Άπελλής) ; l’ornement de l’autel était réputé être l’œuvre de Praxitèle (Πραξιτέλης). L’Artémision hellénistique ne fut achevé que vers le milieu du IIIe siècle avant JC, soit après près d’un siècle de travaux. Entre temps, vers 287 avant JC, l’un des généraux d’Alexandre, Lysimaque, avait déplacé la ville d’Éphèse vers le sud-ouest ; le temple était isolé mais n’en garda pas moins un rôle central dans la vie de la cité durant les trois siècles suivants. Le déclin de l’Artémision débuta quand l’empereur Néron (règne de 54 à 68 après JC) fit piller le temple de Diane par ses légions, pour s’emparer de ses plus célèbres œuvres d’art. À la fin de l’Antiquité, pendant les grandes invasions, en 263 après JC, les Goths saccagèrent le temple, massacrèrent les prêtres et les vierges de l’Artémision, et détruisirent Éphèse de fond en comble. Cependant c’est l’édit de l’empereur Théodose Ier en 380 qui porta le coup de grâce au temple : dorénavant, le christianisme serait la seule religion officielle de l’empire ; tout culte païen étant banni, l’Artémision abandonné tomba en ruine et servit de carrière de pierre aux bâtisseurs de la basilique Saint-Jean à Selçuk et de la basilique de Sainte-Sophie à Constantinople, notamment pour les colonnes de marbre vert de cette dernière. Pendant plusieurs siècles on ignora l’emplacement de l’Artémision, que les archéologues du XVIIe et du XVIIIe siècle recherchèrent en vain. Le temple d’Artémis fut le premier monument du site archéologique d’Éphèse à être redécouvert et fouillé : en 1869, l’ingénieur et architecte anglais John Turtle Wood fouilla le site d’Éphèse ; il découvrit l’emplacement du temple en se fondant sur le témoignage de Philostrate d’Athènes qui mentionnait qu’un certain Titus Flavius Damianus avait relié l’Artémision à la cité au moyen d’une stoá qui débutait à la porte de Koressós ; Wood découvrit cette stoá et la suivit jusqu’au site du temple, dont les ruines étaient enfouies sous 6 m de terre. En 1804 et 1805, d’autres archéologues du British Museum approfondirent les fouilles et découvrirent un trésor d’objets en or, dont la plupart ont été emportés au British Museum. En 1966 des archéologues autrichiens découvrirent l’autel d’Artémis, dans la partie ouest du temple. La statue originale d’Artémis a été retirée d’Éphèse, et est exposée dans le Musée d’Éphèse à Selçuk. Il ne reste presque rien du temple d’Artémis (Artemis Tapınağı), seulement quelques blocs de marbre éparpillés dans un terrain marécageux ; une seule colonne a été partiellement reconstituée avec des fragments divers : elle ne mesure que 14 m sur les 20 m d’origine. Plus un symbole qu’une évocation de ce qui fut l’une des « Sept Merveilles du Monde antique », quatre fois plus grande que le Parthénon d’Athènes ; cette unique colonne fait le bonheur d’un couple de cigognes blanches qui y a installé son nid. Sic transit gloria mundi … comme disaient déjà les Anciens. |
| La Voie sacrée | Lorsque la cité d’Éphèse fut déplacée entre les monts Pion et Préon, à l’époque hellénistique, et que le temple fut situé à l’extérieur de la cité, les processions, qui avaient lieu lors des festivités annuelles en l’honneur de la déesse Artémis, les « Artémisia » (τά Άρτεμίσια), empruntèrent un itinéraire circulaire, la Voie sacrée (n° 73). Une effigie de la déesse tutélaire d’Éphèse était promenée à travers la cité, entourée d’un chœur de jeunes filles vêtues d’une peau de faon et portant l’arc et le carquois. Une inscription, découverte sur un mur de la porte sud du Théâtre, décrit l’itinéraire des procassions. Les processions partaient de l’Artémision par la route descendante (káthodos), pénétraient dans la cité par la porte de Magnésie, longeaient l’agora d’État, suivaient la rue Domitien, la Voie des Curètes, la Voie de Marbre et la rue du Théâtre et ressortaient de la cité par la porte de Koressós ; les processions retournaient vers le temple d’Artémis par la Voie sacrée montante (ánodos). |
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