| La ville de Dubrovnik en Croatie | |
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| Présentation générale | Perchée sur un rocher, ceinturée de hauts remparts baignés par l’Adriatique, Dubrovnik, l’ancienne Raguse, est considérée comme l’un des joyaux du patrimoine architectural mondial. Lord Byron ne la qualifiait-il pas de « perle de l’Adriatique » ? Ruelles étroites à l’ombre bienfaisante où dansent les fils à linge, kaléidoscope des parasols des cafés, petites places fleuries aux pavés doucement lustrés lui confèrent une atmosphère toute méditerranéenne. | |
| Étymologie et toponymie | Le nom de la ville de Dubrovnik vient du mot croate dubrava qui désigne les « chênes verts ». |
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| À l’extrême sud de la Dalmatie, et donc de la Croatie, le petit port de Dubrovnik, situé dans une crique superbe et baignant au milieu des roches ocre et de la végétation méditerranéenne, occupe une étroite bande littorale, au pied des premiers contreforts des Alpes dinariques, à moins de 5 km à vol d’oiseau de la Bosnie-Herzégovine, à quelques kilomètres seulement des frontières du Monténégro. Dubrovnik se trouve à 240 km au sud-est de Split ; il faut compter 4 h de route pour aller de Dubrovnik à Split, en prenant l’autoroute. |
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| Histoire | Les origines | Les Romains investirent d’abord la cité grecque d’Épidaure (l’actuelle Cavtat) pour y développer un riche comptoir marchand. Mais un tremblement de terre et les invasions barbares en chassèrent les habitants. En 614, ils s’installèrent sur un îlot escarpé, séparé de la terre ferme par un étroit bras de mer. Le village, nommé Ragusium, s’agrandit et se fortifia de remparts. Pour se défendre contre les Arabes, il se plaça sous la protection de Byzance. Dans le même temps, dans la montagne Dubrava, un hameau croate, Dubrovnik, occupait le rivage continental, face à l’îlot. Les deux communautés comblèrent le bras de mer au XIe siècle (l’actuel Placa ou Stradun) pour ne plus faire qu’une seule ville, à partir du XIIe siècle. Peu à peu, le nouvel ensemble devint principalement croate, tout en restant un comptoir commercial dynamique. Située sur un site privilégié, premier port sur la route maritime de l’ouest protégé par une ligne d’îles, Dubrovnik est un point stratégique depuis ses origines. | L’emprise de Venise | Entre les Xe et XIIe siècles, la ville fut occupée par les Arabes, les Vénitiens et par les Normands en 1081, avant que Ragusium ne passe finalement sous la tutelle de l’empire byzantin. Malgré celle-ci, la ville-État signa de nombreux traités d’assistance mutuelle avec des puissances voisines. À partir du XIIe siècle, Dubrovnik, encore nommée Raguse, possède une organisation politique et sociale très structurée. Elle est représentée par un recteur élu par les citoyens et gouvernée par deux conseils. Le premier traité de commerce conclu par Dubrovnik date de 1148. À son retour de croisade en 1192, Richard Cœur de Lion sera sauvé de l’orage devant Dubrovnik. ii fit alors un vœu et une donation pour la construction de la cathédrale. Le trafic maritime croissant pendant et après les croisades aux XIIe et XIIIe siècles a fortement contribué à la prospérité de centres marchands maritimes de la Méditerranée et de l’Adriatique et notamment de Dubrovnik. Après la prise de Constantinople par les Vénitiens en 1204, Raguse passe, en 1205, sous la coupe de Venise, alors toute-puissante république. Mais les Ragusains, marins et marchands entreprenants, réussissent peu à peu à alléger le joug vénitien en nouant des traités avec la plupart de leurs voisins. En 1272 fut publié le Statut de codification « Liber statutorum civitatis ragusii ». | La République de Dubrovnik | En 1358, le traité de Zadar met fin à l’emprise de Venise sur Dubrovnik, qui se proclame bientôt République indépendante, sous la férule des grandes familles aristocratiques. Son territoire s’étend de Cavtat et du Konavle, à l’est, à la péninsule de Pelješac, à l’ouest, ainsi qu’aux îles de Mljet et de Lastovo. Durant cet âge d’or, les aristocrates se bâtissent de splendides palais et des résidences secondaires le long de la côte. La ville close compte alors 6 000 habitants (pour 3500 aujourd’hui). | Au cours des XIVe et XVe siècles, Dubrovnik, Venise et Ancône devinrent les centres les plus importants de l’Adriatique. Grâce à des accords et des conquêtes, le territoire de Dubrovnik s’étendit de Klek au nord à Sutorina à l’entrée de la baie de Boka. Elle incluait aussi les îles de Mljet, Lastovo, Élaphites et Lokrum. Dès le XVe siècle, les autorités organisèrent un trafic particulièrement efficace avec l’arrière-pays. | Le statut légal de la république de Dubrovnik fut entièrement établi au XVIe siècle, ce qui impliquait une élection autonome du recteur et des conseillers, une monnaie, et le drapeau où figurait le patron de la ville, saint Blaise, une législature indépendante, ainsi que le droit d’installer des consulats à l’étranger. S’appuyant sur l’ordre social aristocratique, le pouvoir suprême était investi par le « grand conseil », composé de membres des grandes familles. | Pour conserver sa puissance, Dubrovnik soigne ses rapports avec les Turcs qui, après la bataille de Mohács (1526), deviennent de plus en plus menaçants. Sous la pression de la politique expansionniste particulièrement violente des Turcs, la république de Dubrovnik accepta en 1525 de payer un tribut annuel à l’autorité turque, mais obtint en contrepartie le droit de commercer librement avec l’ensemble de l’Empire turc. C’est ainsi, sans armée mais avec une diplomatie particulièrement efficace, que la petite république parvient à asseoir sa souveraineté, sans prendre part au moindre conflit et en évitant la tutelle de l’Espagne et du Vatican. Le seul véritable rival demeurait la république de Venise. | L’économie maritime est à la base de cette prospérité, les vaisseaux toujours plus nombreux traversant la Méditerranée, la mer Noire et les océans pour commercer avec les ports anglais, allemands, indiens ou américains. De 1580 à 1600, Dubrovnik, cité maritime, était à la tête d’une puissante flotte composée de deux cents grands voiliers battant pavillon sur toutes les mers du monde. Cette flotte marchande sillonne les mers, au service du commerce de minerai de plomb, d’argent, de sel et d’orfèvrerie, produite dans les environs. | Cette réussite matérielle, alliée à un sentiment de sécurité et de liberté, est à l’origine du mode de vie humaniste qui se développe à Dubrovnik à cette époque, stimulant les esprits créatifs. La cité atteint alors son plus haut niveau de développement urbain et architectural, qui s’est maintenu jusqu’à aujourd’hui. Les XVe et XVIe siècles ont ainsi été les plus hautes époques de l’histoire culturelle de Dubrovnik, marquées par la célébrité de très grands écrivains. Comme le grand auteur comique Marin Držić, une lignée qui se poursuit jusqu’au plus illustre poète du XVIIe siècle : Ivan Gundulić. Cette époque a aussi connu d’éminents peintres et scientifiques comme Lovro Dobriečević, Nikola Božidarević et Vlaho Bukovac, le mathématicien et astronome Marin Getaldić, les médecins Didak Pir et Đuro Baljivi, l’économiste Beno Kotruljević, le musicien qui a composé les premières symphonies en Croatie, Luka Šorkočević, ou le savant croate universellement reconnu, Ruđer Bošković. | Le grand tremblement de terre, puis Napoléon | Le XVIe siècle est celui des grandes découvertes, de l’ouverture de nouvelles routes maritimes et de la concurrence des puissances rivales. Le dynamisme des navigateurs ragusains aurait peut-être permis à la ville de résister si un tremblement de terre d’une rare violence n’avait précipité son déclin, le 6 août 1667. Plus de 5 000 habitants périssent sous les décombres de la ville anéantie. Même les navires à l’ancre dans le port sont détruits. Des édifices romans, gothiques ou Renaissance, il ne reste presque rien. Seuls les remparts, le palais Sponza et quelques fragments permettent d’imaginer les trésors évanouis. Tout sera reconstruit, dans le style baroque. La ville sera repensée, mais elle ne retrouvera jamais totalement sa puissance passée. Dubrovnik doit alors se battre pour sa reconstruction et le maintien de sa souveraineté. Les vaisseaux naviguent finalement sous drapeau neutre jusqu’à l’arrivée des troupes napoléoniennes et la chute de la République de Dubrovnik en 1808. C’est l’annexion de la Dalmatie par Napoléon, en 1806, qui met une fin officielle à la République. C’est en 1815, au congrès de Vienne, que la cité est rattachée à la Dalmatie et à la Croatie, dont elle partage le destin politique depuis lors. L’empire austro-hongrois étend sa domination, de 1815 à 1918. Dubrovnik n’est plus qu’une petite ville de province. | La guerre d’indépendance | Suite à la déclaration d’indépendance de la république de Croatie et à l’attaque serbe qui y répondit, Dubrovnik fut attaquée en octobre 1991 par les armées communistes serbe et monténégrine qui cherchaient à détruire la totalité du territoire et à acquérir un accès privilégié sur la mer adriatique. La région de Dubrovnik fut occupée et dévastée. La cité elle-même fut entièrement encerclée pendant huit mois, bombardée à plusieurs reprises et détruite partiellement lors d’attaques, début décembre 1991. La communauté internationale et de nombreux intellectuels se sont alors indignés du traitement réservé à un tel patrimoine, impunément. Très endommagée par le conflit armé, la ville a fait rapidement l’objet d’un grand programme de restauration coordonné par l’Unesco. Elle a heureusement pu être reconstruite, et, aujourd’hui, il est difficile de trouver des traces visibles de son douloureux passé. L’héritage culturel et historique est globalement protégé et conservé, à la grande joie des touristes qui commencent à redécouvrir une région et un site, particulièrement riches et surprenants. | |
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